Bertrand LABOUREAU – Dirigeant de LOGOMOTION
Bertrand LABOUREAU a créé il y a 23 ans, la toute première webagency dijonnaise : Logomotion. Une révolution à l’époque pour le territoire : quelques acteurs, tous issus de l’informatique, étaient bien en place depuis quelques mois déjà, mais aucun dans la communication digitale.
Bertrand, pouvez-vous, en quelques mots vous présenter ?
Diplômé de l’Ecole Supérieure de Commerce de Dijon en 1988, j’ai enchainé de belles expériences professionnelles (Maison Louis Max à Nuits St Georges, Musée Grévin de Dijon, Bistream USA fondeur de polices de caractère numériques, CCI de Beaune, …) qui ont ouvert la voie à mon aventure entrepreneuriale. Marketing opérationnel, commercial, communication, digital, conseil, chaque fonction occupée m’a enrichi en tant que professionnel. Après une formation de 6 mois d’infographiste 3D au Lycée Le Castel de Dijon, j’ai en 1999 créé ex-nihilo une agence web à Dijon : Logomotion. Une première pour le territoire, car les rares acteurs déjà présents sur ce marché étaient tous issus du monde informatique et non de la communication.
Qu’est-ce qui vous motive dans ce que vous entreprenez ?
Ce qui me motive principalement dans l’accompagnement de mes clients, réside avant tout dans l’orchestration de l’ensemble des problématiques. Ensuite vient le plaisir de les aider à concevoir leur projet, en les incitant à projeter loin leur mutation numérique dans ses différentes dimensions : l’objectif à terme du nouvel outil, les publics concernés, l’appropriation de l’outil par ses utilisateurs. Pour ce faire, l’écoute occupe naturellement la place prioritaire dans la relation avec mon client. On peut parler logiquement de co-construction, dans la recherche d’un équilibre tout au long de la gestation d’un projet ; l’objectif résidant dans l’établissement d’une relation pérenne durable transparente, garante d’un respect mutuel. C’est le point primordial dans le cas d’une communication utilisant les technologies de l’information.
La traduction métier de notre engagement RSE, réside dans le fait de concevoir, paramétrer et coder les projets en utilisant les bonnes pratiques métier, dont l’impact environnemental est avéré. En général, le gain est de l’ordre de 30 à 50%.
Nous œuvrons par ailleurs depuis 2014 dans l’association nationale de référence dans le domaine du green IT, prêchons la bonne parole dans les écoles d’ingénieurs et les colloques de sensibilisation (tels les IDEAS DAYS de Grenoble) et participons régulièrement à des colloques ou des collectifs dédiés à l’éco-conception de services numériques, parfois commandés ou aidés par l’ADEME.
Quelle est l’importance du commercial dans votre domaine d’activité ?
Le commercial est essentiel dans mon domaine, car la part des prestations récurrentes n’est que de l’ordre de 30%. Les appels entrants et le travail de réseau sont donc prépondérants, s’appuyant sur une communication qualitative de « présence », destinée à informer des innovations et retombées médias le cas échéant.
Le commercial a d’autant plus de sens qu’il porte en son sein la responsabilité de la dimension pédagogique vis-à-vis du client : s’agissant d’une prestation technique, souvent assimilée à de « la com », il est essentiel d’expliquer en amont les processus d’écriture des codes, les étapes de recettage et le mode fonctionnement adopté (en obligations de résultats ou en obligation de moyens).
De plus, le mode de travail en co-construction, dit autrement « méthode agile », gage de qualité avéré, nécessite un engagement certain du client. Il est donc essentiel de sensibiliser, voire de « former » nos clients à la démarche.
Est-il facile d’adopter des comportements commerciaux cohérents avec votre engagement RSE ?
La nécessité commerciale expliquée ci-dessus oblige chacune des parties à une réelle transparence. Pour le prestataire cela se traduit par un suivi détaillé de toutes les interventions, des échanges réguliers avec le client, des phases de mise au point et/ou recettages intermédiaires (nécessitant des reprises techniques dénommées « bugs », inhérentes à l’informatique. Pour le client cela signifie un engagement fort, en termes d’investissement en temps du référent en charge du projet, mais également des publics concernés pour les tests d’usage.
Et c’est à cette condition qu’un respect mutuel peut s’exprimer pleinement en toute confiance.
A défaut, c’est la porte ouverte aux incompréhensions, aux rancœurs, aux conflits et parfois aux actions juridiques : bien souvent, les conflits naissent du fait qu’un développement à façon est assimilé à une simple revente de marchandises, dont le prix connu à l’avance n’est pas sensé varier et dont les bugs, qui font partie inhérente du développement informatique, sont assimilées à des défauts de qualité par le client.
Quelles évolutions voyez-vous dans les pratiques commerciales ?
Nous allons aller probablement, dans notre secteur, vers encore plus de transparence vis-à-vis du client, à savoir travailler au grand jour, sans cacher quoique ce soit, au détriment des travaux forfaitisés confortables commercialement certes, mais insondables pour le client et surtout synonymes de prix de vente plus élevé.
L’idée est de vendre au juste prix pour le prestataire et pour le client. Le client doit accepter la réalité de la programmation informatique faite de nombreuses incertitudes techniques que le prestataire, ne pouvant tout connaître, résoudra. Comme en général, le nombre d’heures final est bien supérieur à celui estimé au départ (par enrichissement progressif par le client du projet au cours de son développement en général), il est évident que ce n’est pas dû à un manquement du prestataire ; par conséquent ce n’est pas à lui de prendre ce dépassement en charge sur sa marge. Mais ce point de vue, pourtant logique et facile à exposer, est difficile à faire accepter dans la réalité.
Et le commercial va jouer, sur ce point, un rôle crucial. Donc encore et toujours expliquer, former, sensibiliser, accompagner… Bref, faire grandir.
Comment pensez-vous, à votre échelle, pouvoir agir sur ces pratiques ?
Nous les mettons en œuvre depuis quelques années, non sans mal. Les projets vendus à prix forfaitaires ont ainsi été abandonnés définitivement. Il faut savoir parfois refuser un projet déséquilibré pour le prestataire.
Nous faisons des efforts importants de pédagogie en avant-vente. Puis nous nous astreignons à rédiger ou accepter que des cahiers des charges techniques et fonctionnels sérieux, garants d’une relation adulte. Nous accompagnons ensuite le client par la plus grande réactivité possible lorsqu’il exprime un souhait d’améliorations.
Pour ce qui est de la transparence de production, nous utilisons des applications de tracking pour toutes les tâches de développement ; enfin, nos outils de gestion de projet sont partageables avec nos clients.
A vos yeux, une personne incarne-t-elle les valeurs de la RSE ?
L’Abbé Pierre ? Naomi Klein ? En réalité tous les acteurs dans l’entreprise doivent incarner ces valeurs, car à défaut, ce ne serait que du « RSE washing ».