Marie-Lucie JACQUEY – Dirigeante de IDÉEAL LOCAL

Marie-Lucie JACQUEY est une professionnelle de la filière alimentaire, qui a pris la décision d’entreprendre, afin de laisser s’exprimer sa vision du marché. Depuis fin Avril 2021, Marie-Lucie propose un nouveau format de distribution : un relais en circuit court spécialisé dans la sélection et la distribution de produits de terroir en saison et en lot.

 

Marie-Lucie, pouvez-vous, en quelques mots vous présenter ?
Après une carrière de 20 ans dans la filière alimentaire, j’ai créé il y a 11 mois Idéeal local à Dijon. J’ai travaillé 9 ans en Californie et 11 ans en France. J’ai choisi la filière alimentaire par grand intérêt pour la cuisine et la gastronomie, autrement dit par gourmandise. Mon parcours m’a permis de travailler à chaque étape de la distribution d’un produit. De la production agricole à la première (ex : farine) et deuxième (ex : pain) transformation agroalimentaire, à la distribution de gros, de semi gros et de détail. Je me suis rapidement intéressée et sensibilisée à la construction du prix dans cette chaîne de distribution ou à la répartition de la valeur.

Qu’est-ce qui vous motive dans ce que vous entreprenez ?
Les enjeux écologiques, économiques, sanitaires sont sérieux et le changement ou l’adaptation de notre modèle de distribution et de consommation est primordial. Je souhaite avec ce projet contribuer humblement à ce processus que l’on appelle, la transition alimentaire. Il désigne une démarche par laquelle une société modifie en profondeur sa manière de produire et de consommer des aliments. Ce qui me motive c’est la création de valeur, le changement, la résilience et l’amélioration de nos pratiques à tous les niveaux pour prendre soin de nous et de notre planète. Suggérer en douceur aux consommateurs de se lancer avec nous dans cette démarche de changement ou de retour à des fondamentaux plus raisonnables. Les invitant à consommer moins mais mieux, d’anticiper leurs achats avec un système de précommande qui implique de l’engagement de toutes les parties prenantes du producteur, au distributeur et au consommateur. La saisonnalité et le local dans la mesure de ce qu’il offre sont la règle puis le complément se fait avec des achats de produits des terroirs voisins les plus proches et les plus appropriés.
Je suis également motivée à l’idée de proposer aux producteurs, éleveurs et aux entreprises de transformation, une nouvelle forme de distribution en circuit court et au schéma de répartition de valeur repensé. Et enfin de structurer et systématiser cette nouvelle chaîne comme l’ont fait les chaînes en circuits plus longs et les grands distributeurs dans le passé.

Quelle est l’importance du commercial dans votre domaine d’activité ?
Le commercial est vital ! Avoir une vision, une mission, des produits et des idées c’est bien, mais il faut les vendre. L’activité commercial de Idéeal local se fait sur deux canaux aujourd’hui, le digital avec notre outil E-commerce et le physique avec notre relais idéeal local basé à Dijon, sur l’ancien marché de gros et ouvert au public du mercredi au samedi. Nous nous adressons aux particuliers et touchons principalement cette cible grâce aux outils et réseaux digitaux. La zone où nous sommes implantés n’est pas encore connues du grand publique donc le digital est vital. Nous nous adressons aussi depuis peu aux restaurateurs et bientôt aux comités d’entreprises. Pour développer cela, nous devons qualifier notre offre et la commercialiser. J’ai donc recruté, le mois dernier, un salarié avec cette mission et il débute son travail de prospection. C’est un travail de fond essentiel à réaliser, pour nous faire connaître et attirer les clients.

Est-il facile d’adopter des comportements commerciaux cohérents avec votre engagement RSE ?
La transition alimentaire nous en sommes partie prenante. Le consommateur doit consommer mieux, le producteur doit produire mieux et le distributeur doit vendre mieux. Je pense que c’est possible et complètement cohérent avec les engagements RSE que nous avons.
Dans nos pratiques commerciales, il y a le système de précommandes. Voici comment je l’explique à mes clients et prospects : Prenez soin de vous en prenant soin de la planète ! Engagez-vous avec nous dans la transition alimentaire, en consommant autrement ! Précommandez c’est vous responsabiliser auprès de nos producteurs partenaires, en assurant la vente et la valorisation de ses produits. C’est aussi vous impliquer auprès d’idéeal local, en nous permettant d’ajuster nos stocks, d’éviter le gâchis et de maîtriser notre impact environnemental.

Quelles évolutions voyez-vous dans les pratiques commerciales ?
Le projet que je porte est nouveau et je n’ai pas de recul pour pouvoir comparer ou voir une évolution. En revanche, je vois une évolution et des différences entre les pratiques commerciales des grands distributeurs, aux chaines de distribution à plusieurs intermédiaires et celles des circuits plus courts. Les grands proposent un modèle d’abondance relative sans limite en poussant à consommer tout, tout le temps et en quantité. Les circuits courts proposent un modèle plus raisonnable, au gré des saisons dans des principes d’approvisionnement strictement locaux dans la mesure de ce que le local offre et tourné vers la qualité.

Comment pensez-vous, à votre échelle, pouvoir agir sur ces pratiques ?
En tant que distributeur en circuit court et avec une vision nouvelle, je préconise un modèle qui se concentre sur la distribution des produits essentiels, les indispensables ou les 20/80 pour parler « commercialement ». Les grands distributeurs offrent aussi des produits essentiels et de qualité et ils ont également des rayons remplis de produits inutiles et non essentiels à nos vies… c’est une offre large et basée sur la quantité qui incite immanquablement à la consommation.
Je n’ai pas la même vision et suggère un modèle épuré et simplifié, fondé sur la réponse à des besoins plus primaires que je qualifie d’essentiel ! Je me concentre dans le sourcing ou la recherche de produits et de producteurs vers des fournisseurs agricoles, artisanaux ou des entreprises aux pratiques agro-écologiques (Bio, Raisonnés, HVE, Label rouge, etc.) et dans la même démarche de progrès vers laquelle nous œuvrons tant au niveau de l’environnement que dans les relations sociales et sociétales.
Nous invitons les consommateurs à s’approvisionner au relais idéeal sur les essentiels au meilleur rapport qualité prix, en partageant au besoin les quantités certes plus importantes et de compléter vos achats alimentaires plus spécifiques, spontanées chez les détaillants artisans et commerçants indépendants locaux, le marché, les magasins de producteurs locaux et les épiceries.

A vos yeux, une personne incarne-t-elle les valeurs de la RSE ?
Tristan LECONTE, fondateur de Alter Eco, Pure project etc. Entrepreneur RSE dans son incarnation à tous les niveaux. De la promotion de l’agroforesterie au commerce équitable, il porte et fait rayonner des projets agro-écologiques et sociétaux à l’échelle internationale, basés sur des valeurs RSE à « 1000% ».
J’ai eu la chance de le rencontrer sur un salon professionnel dans ma carrière américaine et c’est un homme brillant, bienveillant, visionnaire et inspirant !
J’ajouterais John MACKEY, fondateur et CEO de Wholefoods Market aux US, homme d’affaire, écrivain et leader d’un mouvement capitaliste conscient. Il est l’un des défenseurs les plus influents du mouvement pour l’alimentation biologique aux US. C’est un libertarien partisan du libre marché. Il est végétarien, partisan du droit animal et de l’alimentation biologique. Il soutient une philosophie de stakeholder : pour être compétitive, l’entreprise doit tenir compte de toutes ses parties prenantes.
Je parle de lui car c’est après une visio avec lui lors d’un séminaire d’entreprise que m’est venue l’idée de Idéeal local, du moins qu’elle a commencé à germer en 2008.